Ancien banquier, Stéphane Chézal s’est battu pour arriver à la tête de cette entreprise, la Biscuiterie Agenaise, qui fabrique chaque année 2 millions de boîtes de pain azyme et de biscuits casher.
« Un autre monde. »
Voilà où Stéphane Chézal a eu le sentiment d’atterrir quand, pour la première fois, il est entré dans la Biscuiterie agenaise.
L’entreprise détenue par la famille Bitone était cliente de la banque où il travaillait à Agen.
« J’étais à Paris, où j’avais un poste de chargé d’affaires pour les grandes entreprises. Ma famille étant restée ici, je suis revenu il y a deux ans, l’inverse n’étant pas envisageable. »
Même pour un natif du coin, le décrochage est brutal. Rapidement, le banquier s’ennuie dans une activité professionnelle qui ronronne et lui oblige à mettre le nez dans des comptabilités associatives plutôt que dans celles des mastodontes du CAC 40.
Jusqu’à ce fameux jour de janvier 2021 où ses fonctions l’amèneront dans l’usine de fabrications de gâteaux, ouverte en 1956 par la famille Maury, avant de se spécialiser dans la production du pain azyme et de biscuits et matsot pour la Pâque juive. La première est commercialisée sous la marque de l’entreprise. La seconde sous celle de « La Bienfaisante ». Cette production saisonnière est garantie casher pour Pessah par le Beth Din du Grand Rabbinat de Paris.
King Salomon
Les fours cuisaient ces fameux biscuits, dont le bestseller, le carré à l’orange, quand Stéphane Chézal a poussé les grilles de la rue Michelet.
« Ils se produisent exclusivement de décembre à mars comme on me l’a alors expliqué. Je suis allé dans les ateliers par curiosité. En voyant la façon de travailler des salariés, les outils, les rabbins qui contrôlaient la fabrication, j’ai ressenti quelque chose. Alors quand le comptable m’a dit que les propriétaires cherchaient à vendre, pour moi qui cherchais un challenge, c’était une chance. »
Passons sur les vicissitudes de la transaction, les pèlerinages chez les banquiers et tout le reste. Pour Chézal, goy et profane de l’agroalimentaire, mais pointu dans la gestion d’entreprises, le rachat de la Biscuiterie n’a pas été du gâteau.
« Niveau challenge, j’ai été servi. Je me suis battu pour en arriver là. Un an de bataille. Tout s’est décanté quand j’ai pu enfin rencontrer Michel Emsalem, auquel a toujours été vendue la totalité de notre production de biscuits de Pessah. Il ne voulait pas risquer de voir l’usine fermer définitivement ses portes, alors nous nous sommes associés avec sa société King Salomon qui est le distributeur exclusif dans l’Europe entière. »
« Niveau challenge, j’ai été servi. Je me suis battu pour en arriver là. Un an de bataille. Tout s’est décanté quand j’ai pu enfin rencontrer Michel Emsallem ».
2,7 millions d’euros
Aux manettes depuis le 9 mars, le PDG détient 60 % des parts d’une entreprise dont le chiffre d’affaires de 2,7 millions d’euros est à 45 % assurés par les biscuits de Pâque.
« La base est là, mais tout est à faire. Ici, la communication n’a jamais été une préoccupation. Nous avons donc créé un site Internet, lancé la vente en directe, on va aller sur les réseaux. »
Cette usine, restée dans son jus, où les méthodes de travail se transmettent tel un héritage, sort 2 millions de boîtes par an dont 1,4 de pain azyme. Une vingtaine de salariés travaille sur neuf références. Un ensemble que Chézal veut tirer de cet anonymat.
« Nous sommes leader sur un plan national, confie Stéphane Chezal. Et si nous voulons nous développer, ce ne sera jamais en renonçant à nos valeurs, au savoir faire.
Nous sommes des semi-industriels, nos recettes sont sans colorant, sans conservateurs. Nos farines sont 100 % françaises. Et ça ne changera pas. Chez nous à la biscuiterie, les 40 mètres de four au gaz s’allument encore à la main. Maintenant, nous avons plusieurs objectifs devant nous, mais il faut se faire connaître encore plus, s’ouvrir. »
Déménagement prévu
En business, s’ouvrir cela signifie aussi s’exporter. Implantée sur le marché canadien, la Biscuiterie agenaise s’est donné les États-Unis comme territoire de croissance. « Nous voulons aussi aller sur le marché israélien avec ‘’La Bienfaisante’’.
Une fois ces actions enclenchées, nous travaillerons sur l’élargissement de notre gamme, avec de nouvelles recettes, en bio ou Label rouge. Mais je le redis, sans rien changer de notre savoir-faire traditionnel. »
Il existe pour autant des élé ments sujets à changements. Et non des moindres. L’outil de production est sous la con trainte d’un déménagement dans un délai de deux ans et demi puisque la famille Bitone a l’intention de vendre le site.
« Nous n’avons acheté que le fonds et avons signé un bail précaire. Nous sommes donc à la recherche d’un terrain de 10 000 m². Ce déménagement est l’autre grand projet de la biscuiterie. Nous commençons d’ores et déjà à étudier les possibilités. »
Christophe Massenot, SUD OUEST. c.massenot@sudouest.fr